- SOLS - Propriétés physiques et mécaniques
- SOLS - Propriétés physiques et mécaniquesDu point de vue de ses propriétés physiques et mécaniques, le sol peut être considéré comme un système poreux à trois phases: solide, liquide, gazeuse.Certaines des caractéristiques de ce système sont permanentes; c’est le cas de la constitution physique du matériau: granulométrie, morphologie et espèce minéralogique des particules élémentaires. De façon très globale, un matériau déterminé peut être caractérisé une fois pour toutes par sa texture , qui traduit l’influence sur son comportement des différents constituants et des interactions qui se manifestent entre eux.D’autres éléments de description sont plus contingents: la géométrie du système, couramment appelée structure par les agronomes et les pédologues, bien qu’elle dépende au premier chef de la texture, varie en fonction de l’intervention de facteurs climatiques (pluie, gel, sécheresse), biologiques (racines des végétaux, micro-organismes et macro-organismes du sol) et mécaniques, ces derniers mis en œuvre par l’homme pour l’utilisation du sol (agriculture, génie civil, etc.).Enfin, l’équilibre des phases solides et liquides se déplace incessamment, et parfois de façon très rapide, en fonction du régime hydrique du sol.Il résulte de ces considérations que les notions instantanées d’état physique et de comportement mécanique doivent être complétées par celles de leur évolution dans le temps, principalement en fonction de l’humidité.1. Principales propriétés physiquesEn interaction étroite avec les facteurs du climat, les propriétés physiques commandent les conditions de température, d’aération, de circulation et de stockage de l’eau, d’implantation et de fonctionnement du système racinaire des végétaux.Plus ou moins directement, toutes les propriétés physiques se rattachent à une caractéristique fondamentale qui est la porosité .La porosité d’une couche de sol en place est la partie d’un volume apparent unitaire qui n’est pas occupée par la phase solide. On la détermine à partir de mesures de densité apparente da (poids de terre sèche par unité de volume apparent) et de densité ou poids spécifique réel dr de la phase solide. La porosité totale P s’exprime en pour cent, à partir de ces données, par la relation:Cette porosité est susceptible de varier de valeurs inférieures à 25 p. 100, pour des sols sablo-limoneux compacts, à des valeurs supérieures à 60 p. 100, pour des matériaux à structure fragmentaire fine, ou bien à la surface de sols argileux humides et fortement gonflés.À la connaissance du volume total de l’espace poreux doit s’ajouter une évaluation de sa configuration: la taille des pores principalement, mais aussi leur forme, leur orientation, leur degré de connexion, leur tortuosité, etc. On doit pour cela faire appel à toute une série de techniques: porosimétrie au mercure, perméamétrie, morphométrie sur plaque mince, établissement de courbes de pF (teneur en eau en fonction de la succion), etc.D’un autre point de vue, la porosité totale du sol résulte le plus souvent de la superposition de différents niveaux d’arrangement des constituants du sol:– À l’échelle de l’assemblage élémentaire, la disposition relative des particules individualisées au cours de l’analyse granulométrique ménage un premier système de porosité dite, du fait de son origine, texturale;– Dans le cas des structures fragmentaires, les éléments structuraux sont délimités par un réseau plus ou moins complexe de fissures qui constitue, avec les canalicules et alvéoles d’origine biologique ou pédologique, un deuxième système de porosité dite structurale.La porosité texturale (fig. 1 b) représente la fraction la plus importante et la plus fine de la porosité totale. Son rôle est essentiel dans le domaine de la réserve en eau des sols, de la circulation de l’eau par des mécanismes de succion, de la température et de l’aération du sol; on la mesure sur des agglomérats terreux d’une taille suffisamment petite pour ne pas comporter de porosité structurale ou sur un échantillon auquel on a conféré artificiellement une structure continue et homogène. On peut considérer que c’est une caractéristique intrinsèque du matériau à une humidité donnée.La porosité structurale (fig. 1 a) a fréquemment une taille suffisante pour être observable à l’œil nu ou à un faible grossissement. Elle ne constitue, si l’on excepte les couches du sol qui viennent d’être ameublies, que quelques pour cent du volume apparent unitaire. Bien que chaque système de porosité n’ait pas l’exclusivité de régir tel ou tel phénomène, son influence est prépondérante sur les possibilités d’enracinement, l’indice d’ameublissement global d’un horizon, la perméabilité à l’eau circulant par gravité. Elle est obtenue par différence entre la porosité totale et la porosité texturale, et elle est susceptible de variations aussi rapides que celles de l’état structural du sol dont elle est la conséquence.Caractéristiques hydriquesStockage de l’eauLorsqu’on apporte à un sol une quantité suffisante d’eau, il peut être saturé, c’est-à-dire que la totalité de sa porosité est remplie d’eau (fig. 2). Même en l’absence de toute évaporation, la teneur en eau correspondant à la saturation n’est, très généralement, pas stable; l’eau contenue dans la fraction la plus grossière de la porosité (macroporosité) circule par gravité ou par succion des couches inférieures plus sèches: le sol se «ressuie» et tend vers un palier d’humidité correspondant à la capacité au champ (l’eau occupe alors ce qu’on appelle la microporosité).À cette humidité caractéristique, l’eau ne circule plus que très lentement et le sol ne se dessèche que par évaporation directe pour les couches les plus superficielles ou par absorption d’eau par le système racinaire des végétaux. Ce dernier ne peut extraire de l’eau du sol que jusqu’à une humidité limite qui est caractéristique du matériau et qui correspond au point de flétrissement permanent .L’évaluation directe de la capacité au champ et du point de flétrissement permanent est délicate et se prête mal à des déterminations en grande série. Aussi a-t-on recours à des évaluations en laboratoire. Le sol, qui a été préalablement saturé, est ressuyé sous une pression pneumatique convenablement choisie et qui varie suivant la texture de ce sol et, bien entendu, la caractéristique hydrique à laquelle on s’intéresse.En définitive, l’eau utile pour les végétaux correspond à l’intervalle entre la capacité au champ c et le point de flétrissement permanent f (fig. 2). Exprimée en millimètres, la réserve en eau utile R d’une couche de sol d’épaisseur p (en dm) peut être calculée par la relation:dans laquelle c et f sont exprimés en grammes d’eau pour 100 grammes de terre sèche et où da représente la densité apparente (tabl. 1).Il est à noter que la capacité au champ d’un sol est une caractéristique essentiellement liée à la texture du ou des matériaux qui constituent ses différents horizons (tabl. 2). Comme cela est également vrai pour l’humidité au point de flétrissement permanent, on peut considérer que la réserve en eau d’un sol est une donnée permanente pour une profondeur d’enracinement donnée (tabl. 1).Circulation de l’eauLorsque le sol est saturé, l’eau qui percole à travers une tranche de sol le fait sous l’influence de la gravité. Le débit Q est donné par la loi de Darcy:dans laquelle H représente la charge d’eau, S la section de terrain concernée et l l’épaisseur de la tranche de sol. Le coefficient K, qui a les dimensions d’une hauteur d’eau percolant par unité de temps, exprime la perméabilité du terrain. Sa détermination est nécessaire au calcul des réseaux de drainage, mais elle est délicate, quelle que soit la méthode utilisée (blocs de Vergières ou rabattement de nappe de Porchet), car elle ne peut intervenir que sur un matériau non remanié. En effet, c’est principalement l’espace poreux, que nous avons qualifié de structural, qui assure la circulation rapide de l’eau grâce à ses dimensions plus importantes.Les sols les plus perméables ne sont, de ce fait, pas nécessairement les moins argileux, mais ceux qui ont une porosité structurale suffisante lorsqu’ils sont saturés, c’est-à-dire après gonflement des colloïdes.Au-dessus de l’humidité correspondant à la capacité au champ, l’eau circule beaucoup plus lentement en obéissant à des lois plus complexes et moins bien établies. Deux facteurs interviennent de façon déterminante: d’une part, le gradient d’humidité et, d’autre part, les dimensions et la configuration de l’espace poreux. C’est ainsi que la «mobilité» de l’eau est plus grande dans les matériaux à texture moyenne (limoneuse ou limono-sableuse) que dans les terres sableuses et argileuses. De même, la distance à laquelle une racine est capable d’extraire l’eau du sol est variable selon la texture, et elle est supérieure dans les sols limoneux dans lesquels un enracinement moins dense peut assurer une exploitation convenable des réserves. Encore faut-il qu’il n’y ait pas déséquilibre entre la succion à laquelle est soumise l’eau (racines, évaporation) et la mobilité de celle-ci; sinon, il y a rupture du film aqueux et blocage de la circulation de l’eau.Caractéristiques thermiquesLa température du sol influence la vitesse et (ou) l’intensité de nombreux processus biologiques et physiques. En deçà et au-delà de certains seuils, elle peut même les interdire. Parmi les principaux, nous citerons la germination, la croissance racinaire, l’activité de la microflore et, aux basses températures, le gel du sol et les différentes conséquences physiques et mécaniques sur le sol et la plante.La température en un point donné du sol dépend du bilan de l’énergie calorifique et de la capacité calorifique en ce point.Si l’on se place dans le cas précis, le plus important en agronomie, du réchauffement du sol au printemps, la première caractéristique qui intervient est l’état de la surface du terrain qui, en sol nu, commande le taux d’absorption de l’énergie solaire incidente. Les terres claires à surface glacée et humide réfléchissent davantage le rayonnement incident que les terres foncées à surface rugueuse. Les agriculteurs disent que les premières sont des terres «froides».La transmission de l’énergie absorbée est fonction de la conductibilité thermique ; celle-ci est d’autant plus élevée que le sol est plus compact et (ou) qu’il est plus humide (tabl. 3). Un sol peu conducteur, parce que très poreux et peu humide, aura, pour un niveau donné de chaleur absorbée, une élévation plus rapide de la température de sa couche superficielle, et cela d’autant plus que la capacité calofirique spécifique d’un tel matériau est généralement assez faible (tabl. 4).En définitive, ce réchauffement de la partie superficielle du sol dépend en premier lieu de sa teneur en eau, mais aussi de sa structure (macroporosité) et de l’état de sa surface. C’est donc la résultante d’un ensemble de données liées à la nature du terrain et à la manière dont il est cultivé.L’aération du solLe volume et la composition de l’atmosphère du sol ont d’importantes conséquences sur la plupart des phénomènes biologiques du sol, qu’il s’agisse de l’implantation et du fonctionnement du système racinaire ou de l’activité des micro-organismes.Le volume de gaz contenu dans l’unité de volume d’un sol en place correspond, à chaque instant, à la part de la porosité qui n’est pas occupée par de l’eau. Dans le cas d’un sol dont le drainage est librement assuré, cette teneur est donc, excepté dans une courte période après une pluie ou une irrigation, au moins égale à la macroporosité qui, de ce fait, représente une capacité minimale pour l’air ; elle est donc directement liée à l’humidité du sol, en particulier à son drainage. Dans le cas d’un sol à la capacité au champ, elle dépend de l’état structural et de la porosité grossière qui en découle. Toutefois, la teneur en air du sol ne suffit pas à définir un état d’aération. On doit prendre en considération sa composition en gaz carbonique et oxygène, et vraisemblablement en gaz réducteurs (hydrogène sulfuré, méthane, acides organiques volatils, etc.).Cette composition en un point du sol résulte de l’équilibre entre les modifications engendrées par l’activité biologique du sol (évolution des matières organiques principalement), qui a généralement pour effet d’accroître la teneur en C2, et, dans les cas d’anaérobiose, en gaz réducteurs, et le renouvellement par échanges avec l’atmosphère extérieure. Ces échanges sont essentiellement régis par des mécanismes de diffusion.Il s’ensuit que les principaux facteurs qui influent sur l’aération en un point donné du sol peuvent être rattachés à l’une des catégories suivantes:– présence de matières organiques à évolution rapide (substances peu lignifiées, conditions physico-chimiques favorables à l’activité microbienne);– facilité de communication avec l’atmosphère extérieure (profondeur, porosité, humidité).Propriétés du sol et enracinementLa croissance du système racinaire est directement commandée, outre les conditions de température et d’aération que l’on vient d’examiner et diverses conditions chimiques ou physico-chimiques, par la configuration et par la rigidité de l’espace poreux.En résumé, on peut considérer que la configuration des pores doit être compatible avec les dimensions de racines de l’espèce végétale concernée, et cela d’autant plus que le matériau est plus rigide (sol sec ou sableux) et donc moins susceptible de se déformer sous l’influence des pressions axiales ou radiales de croissance des racines. On conçoit que la porosité d’origine structurale soit déterminante à cet égard, compte tenu de la dimension moyenne des racines des végétaux.2. Évolution de la structureSous l’influence des facteurs climatiques, biologiques et mécaniques, la structure du sol est, on l’a dit, susceptible d’une évolution souvent rapide et profonde. Cette évolution peut se produire dans le sens d’une dégradation (diminution de la porosité structurale) ou d’une régénération (accroissement de la porosité). La constitution physique du sol (texture, taux de matière organique), sa composition ionique (cf. SOLS - Physico-chimie) influent considérablement sur la stabilité structurale (résistance à la dégradation) et sur l’aptitude à la régénération de la structure (cf. SOLS - Amélioration et travail).On dispose de tests éprouvés pour apprécier la stabilité structurale d’un sol. Certains d’entre eux sont même interprétables en termes de facteurs responsables de ce comportement. C’est ainsi que le test de Hénin permet d’attribuer à la texture, à la teneur en matière organique et (ou) à la teneur en électrolytes la stabilité d’une terre donnée.Pour ce qui concerne l’aptitude à la régénération, le plus souvent par des mécanismes de fissuration, bien que moins connue, elle paraît être sous la dépendance des mêmes facteurs jouant soit dans le sens de leur action sur la stabilité (texture, composition ionique), soit en sens inverse (matière organique).3. Propriétés mécaniquesAu cours des opérations de travail du sol, qu’elles soient conduites en génie civil ou en agriculture, le résultat du passage d’un instrument dépend du comportement mécanique du matériau traité. Il en est de même des déformations du terrain dues aux roulages de véhicules ou d’appareils de traitement phytosanitaire ou de récolte, et de celles qui se produisent sous l’effet des pressions exercées par les racines lors de leur croissance.Quelle que soit l’échelle à laquelle on se situe, la terre présente à cet égard des propriétés variables en fonction de sa constitution physique et de son humidité.La principale de ces propriétés est la cohésion (fig. 3):– À l’état sec, la plupart des matériaux terreux sont cohérents ou encore fragiles : sous l’effet d’une contrainte, un échantillon se rompt sans avoir subi de déformation permanente notable; dans cet état, la cohésion est le plus souvent maximale;– Au-delà d’une certaine humidité, variable suivant les sols, la terre devient plastique : il est alors possible de la déformer de façon permanente avant de la briser. La cohésion diminue fortement au fur et à mesure que l’humidité augmente;– Enfin, si l’humidité dépasse un seuil lui aussi variable, la terre tend à se comporter comme un liquide plus ou moins visqueux: la cohésion, bien que non nulle, devient très faible.S. Atterberg a défini à l’aide de tests les humidités critiques que sont la limite inférieure de plasticité et la limite de liquidité . Bien qu’arbitraires, ces «limites d’Atterberg» sont le moyen le plus pratique dont on dispose pour prévoir le comportement d’un terrain en fonction de son humidité. Les régressions linéaires qui ont pu être établies entre les limites d’Atterberg et différents constituants des sols, et dont certaines sont présentées à titre d’exemple, illustrent l’influence de la teneur en argile et en matières organiques sur la position et l’étendue des domaines d’humidité correspondant aux différents états (tabl. 5).Au cours de la réalisation des opérations aratoires (au sens large), une autre propriété intervient: l’adhérence de la terre à une surface métallique (fig. 3). Lorsque cette adhérence est excessive, l’opération devient impossible ou bien nécessite un effort de traction prohibitif. L’adhérence croît avec l’humidité jusqu’à un maximum dit point d’adhésivité , situé fréquemment un peu avant la limite de liquidité. Les terres argileuses ont une adhérence particulièrement élevée.Enfin, la sensibilité à la compaction exprime la susceptibilité qu’a le sol de se déformer par rapprochement de ses constituants élémentaires, sous l’influence d’une pression qui lui est appliquée. Cette propriété présente une importance considérable aussi bien en génie civil, où l’on recherche des matériaux compactables et (ou) des humidités réductibles au maximum pour les assises de fondations, qu’en agronomie, où, au contraire, la compactabilité est un inconvénient majeur qu’on cherche à minimiser en n’effectuant les roulages qu’en dessous d’une humidité critique à laquelle la sensibilité du terrain est la plus élevée.Les mécanismes de compaction, encore incomplètement connus, font intervenir un pouvoir de lubrification du système eau-argile qui facilite le réarrangement plus compact des particules limono-sableuses. Contrairement à une opinion courante, ce ne sont pas les terres argileuses qui sont le plus compactables, mais des matériaux limono-sableux ou sablo-argileux, dans lesquels la part de porosité texturale non liée à la phase argileuse est relativement importante.Le choix des humidités favorables aux différents travaux repose sur une synthèse adaptée à chaque combinaison «type d’opération-texture du matériau».
Encyclopédie Universelle. 2012.